samedi 13 septembre 2014

La Poste à la ramasse selon 'Capital' de septembre 2014 ou pas...

Deux petites allusions dans le numéro 276 de Capital daté septembre 2014 annoncent des moments difficiles pour La Poste française. Bien fait pour elle vue la réexpédition chaotique que subit mon courrier de mon ancien domicile. Sauf qu'en creusant les allusions, ce n'est peut-être pas toujours méritée...

Tout d'abord un beau dossier pédagogique d'un trio rédactif sur le rôle des autorités indépendantes et de l'activisme de leurs présidents respectifs ; ces organismes étatiques s'assurant du respect des règles du jeu dans certains secteurs-clés ou stratégiques (télécoms, audovisuel, ferroviaire, énergie, bourse, jeux en ligne) ou de la concurrence globale.

C'est cette dernière, l'Autorité de la concurrence présidée par Bruno Lasserre, qui a une enquête postale sur le feu : elle a « un soupçon d'entente dans les colis postaux »... C'est tout et c'est bien mystérieux. La photographie d'illustration est claire : un facteur en bleu et jaune remettant un colis au scotché portant oiseau postal et la légende « Colis postaux : soupçons d'entente entre Poste et privés ».

En effet, Google Actualités révèle plusieurs articles mi-juillet 2014 sur ce lancement d'enquête. Un vieux sujet puisque le 12 mai 2011, l'Autorité interdisait l'accord de coopération entre La Poste et Mondial Relay, quelques mois à peine après l'ouverture de ce secteur à la concurrence.

Au gré de mes découvertes dilettantes, il est vrai que le secteur du colis de bureau postal à particulier, de point-dépose en point-retrait connaît de multiples acteurs... même si certains appartiennent au groupe La Poste sans trop en faire la référence dans leur publicité, tels La Navette Pick Up et ses transporteurs Geopost.

Sauf que si Capital insiste sur La Poste, l'article de Challenges du 16 juillet (à partir d'une dépêche Reuters) met la loupe sur trois filiales françaises de deux groupes européens et un états-unien : TNT Express et sa filiale TNT Express France, FedEx pour FedEx Express France (original pour l'ancienne Tatex) et Royal Mail pour GLS.

Rien sur une entreprise liée à La Poste...

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Plus tangible est la poste aux armées que les philatélistes militaires savent en réforme en ce début de vingt-et-unième siècle, tel le blog La Poste aux armées qui annonce régulièrement la dissolution des bureaux postaux interarmées.

Avec Capital, nous retrouvons qui fait passer ce courrier « avec l'engagement de livraison, un argument qui a fait mouche » : l'entreprise de restauration collective Sodexho livre depuis 2011 le courrier des militaires français en opération.

Une activité de moins en moins étonnante pour ce groupe, la cantine ne pourvoyant que de faibles marges bénéficiaires que le groupe s'emploie à maintenir par une stricte lutte contre les repas jetés et maintenant le plus possible son personnel peu qualifié, mais bien formé.

Il s'emploie donc, en France et dans le monde, à développer des activités de services aux entreprises demandant personnel peu qualifié et tâches répétitives : de la gestion du stress des cadres chinois à la désinfection aux lampes au xénon dans les hôpitaux états-uniens, voire la gestion de salles de sport à côté des cantines de plate-formes pétrolières canadiennes.

Pour les militaires française, ce que ne dit pas Capital dans sa petite phrase, c'est que Sodexho et La Poste travaillent en consortium sur ce contrat depuis novembre 2012 jusqu'à 2016, en se répartissant le travail selon la présence de personnels de Sodexho.

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Finalement, tout n'est pas si sombre pour La Poste. Quant à mon courrier censé être réexpédié... peut-être devrais-je demander à ma concierge de se faire embaucher par Sodexho ?

dimanche 7 septembre 2014

Jean-Pierre Callu : discret révolutionnaire numismate

Dans son édition daté dimanche 7 - lundi 8 (version web), Le Monde publie la nécrologie de l'académicien, latiniste, historien et numismate Jean-Pierre Callu, mort le 29 août 2014.
Jean-Pierre Callu en tenue d'académicien (site de l'Académie des inscriptions et belles-lettres).
Normalien, agrégé de lettres classiques au début des années 1950, papillonne à l'École pratique des hautes études (EPHE), à l'École française de Rome, il se fixe sur les monnaies pour ses études de l'Empire romain tardif (IIIe-Ve siècle).

Comme la numismatique est considérée comme une basse science auxiliaire de l'histoire, il passe sa carrière d'universitaire comme enseignant de latin et de littérature latine aux universités de Strasbourg, de la Sorbonne, de Rennes et de Nanterre.

C'est en 1981 que l'EPHE crée un statut à la mesure de son œuvre d'historien : il devient directeur d'« histoire et littérature du Bas Empire ».

En effet, au-delà de la traduction et de la leçon des textes latins, jusqu'aux plus négligés, dès les années 1960, il étudie tout vestige monétaire permettant de comprendre l'évolution de l'Empire dans ses derniers siècles : archéologue dans les provinces extérieures, rat de bibliothèque dans les cabinets de médaille et collectionneurs dans les catalogues des collections célèbres et des ventes.

Cette étude systématique lui a permis de renouveler la connaissance de la circulation monétaire, et par là, de l'histoire économique de l'Empire tardif.

Depuis 1995, il siégeait à l'Académie des inscriptions et belles-lettres.


Je me permets de citer la fin de la nécrologie rédigée par Philippe-Jean Catinchi car elle montre en quoi le travail de Callu tranche avec notre époque de crétins historiens-stars, de numismates achetant des pièces décorées du Vatican, et autres couples de littérateurs mal assortis :


« (...) cet homme discret, presque timide, 
a mené un parcours semblable à son sujet d'études : 
invisible au premier regard mais décisif 
pour qui veut comprendre les enjeux réels de la recherche. »

Aller plus loin, ses deux premiers grands textes fondateurs :
- Genio Populi Romani (295-316) : contribution à une histoire numismatique de la Tétrarchie, 1960 ;
- La Politique monétaire des empereurs romains de 238 à 311, 1969 ;

puis de l'étude de littératures latines :
- Lettres, puis Discours du sénateur Symmaque (340-405), 1972-2009 ;
- avec Anne Gaden et Olivier Desbordes, tome 1 de l'édition de l'Histoire auguste, 1992 ;
- avec Pierre Riché, Correspondance de Gerbert d'Aurillac (alias pape Sylvestre II), 1993.