dimanche 29 mars 2015

Felipe VI et Moneda gaffeuse

Cette semaine passée, Felipe VI, roi d'Espagne, devait effectuer la première visite d'État de son règne en France, du mardi vingt-quatre au jeudi vingt-six mars 2015. Une catastrophe aérienne a forcé à écourter rapidement l'occasion et exagérément monopoliser l'attention médiatique tandis que le nombre d'États faillis (Yémen, Libye) augmentait, les dictatures en action (Russie) perduraient et les groupes de terreur (Syrie, Irak, Nigeria, Tunisie) perpétuaient, cette semaine, les précédentes, les suivantes.

L'exposition Velázquez au Grand Palais s'ouvrit moins royalement. Néanmoins, l'article de Sandrine Morel, publié dans Le Monde daté mardi vingt-quatre, reste un bilan des trois premiers trimestres du règne au cours desquels le nouveau souverain a jeté les bases d'une nouvelle confiance entre la Maison royale et le peuple espagnol : transparence et parcimonie financière, être physiquement plus présent en Catalogne et, par le discours, des ballotés des tourments économiques.
Revers et avers de la pièce de deux cents euros en or, vendue six cents soixante-quinze euros à deux mille cinq cents exemplaires (site de la RCM-FNMT).
Seule ombre au tableau : deux pièces de monnaie commémoratives en métaux précieux de la Real Casa de la Moneda.

Participant aux commémorations de la fin de la Seconde Guerre mondiale, la Monnaie espagnole a tiré dix mille pièces de dix euros en argent et de deux cents en or, vendues très cher. Une colombe porteuse de rameaux annonce « 70 años de paz », soixante-dix ans de paix.

Le mardi dix-sept mars, El Pais se fait écho des premiers commentaires outrés : pour beaucoup d'Espagnols, les trois premières décennies de la période célébrée appartiennent au régime fasciste et dictatorial du général Franco...

Comme l'Occupation et la collaboration jusqu'aux années 1970-1990 en France, comme encore la guerre d'indépendance algérienne jusqu'à nos jours mêmes, les mémoires de la période franquiste ne sont toujours pas apaisées et la Moneda aurait pu se souvenir :
- soit que l'Espagne fut neutre et se passer des revenus de cette frappe... inimaginable pour n'importe quel service philatélique ou numismatique actuel,
- soit avoir le courage de représenter nommément ou en allégorie l'ensemble des Espagnols qui ont combattu l'Allemagne nazie et ses satellites ou qui ont contribué à rendre la frontière pyrénéenne poreuse après la débâcle française.

À suivre : Waterloo et France gaffeuse.

samedi 28 mars 2015

Brèves de l'Antarctique anglais à la généalogie française

En espérant avoir plus de temps pour des articles plus longs, deux brèves de lecture d'hier.

Par mail, le marchand Stanley Gibbons tambourine ses promotions de mars, en cours jusqu'au mardi trente-et-un à venir. Notamment, pour les passionnés, la deuxième édition du catalogue des territoires antactiques à moitié prix, trois ans après sa sortie. Si une troisième édition paraît prochainement, nous saurons que c'est un succès suffisant.
La couverture du catalogue antarctique de Stanley Gibbons (site web).
Côté généalogie, à contre-courant des colères et rancœurs liées à l'inflation des tarifs postaux, La Revue française de généalogie rappelle une vérité raisonnable dans son numéro deux cents seize daté février-mars 2015. Dans un rappel sur les demandes généalogiques que le particulier peut légalement adresser aux mairies et aux archives départementales (pages seize et dix-sept), Guillaume de Morant écrit :

« un courrier revient toujours moins cher qu'un aller-retour en train avec cinq nuits d'hôtel ! »

Surtout quand ses ancêtres se dispersent sur plusieurs départements à travers la France.

dimanche 22 mars 2015

Cohesio à la suisse : même la boîte aux lettres s'y met

Votre boîte aux lettres à recevoir prospectus, courriers publicitaires et autres promesses mirifiques de politiciens en mal de non-abstentionnistes peut devenir un élément de cohésion sociale - vous savez, le nouveau dada de La Poste française.

C'est Le Hub de celle-ci qui nous l'apprenait, le vingt-neuf août 2014, à partir d'une initiative associative suisse. Ce blog d'actualités de la relation clients permet à tous ceux qui veulent nous vendre quelque chose de trouver de nouvelles manières de déposer l'offre dans notre boîte aux lettres.
Une partie des stickers disponibles chez Pumpipumpe (extrait de leur site web).
Pumpipumpe propose d'envoyer en Suisse (ou les retirer au studio graphique MeteorCollective à Berne) et en Allemagne (à Hamburg via une entreprise de location d'objets entre particuliers) de petits autocollants carrés à coller sur sa boîte pour signaler aux voisins les outils et objets que l'on accepte de préter, afin d'éviter ainsi des achats ou des locations pour des choses à usage limité : perçeuse à mèches à béton, luge, moule à gaufres, planche de surf, remorque pour vélo, etc.

Soutenu par des institutions suisses, l'envoi est gratuit - et timbré - dans la Confédération ; pour les Allemands et les citoyens préteurs du monde, il est demandé cinq francs suisses de frais de port. Certaines photographies de boîtes montrent des usages jusqu'aux États-Unis.

La Fédération des sociétés philatéliques suisses peut encourager des modèles spécifiques : loupe à fort grossissement, compte-fils, lampe de Wood, nuancier, catalogues, bibliothèque hyperspécialisée, etc.

Selon les immeubles et lotissements, il n'est pas sûr que certains voisins tatillons sur les apparences de la copropriété idéale apprécient... mais ce sont les mêmes qui râlent contre les distributeurs de publicité.

vendredi 20 mars 2015

Nouveau revers d'une livre : entre traditions et modernité

Note : oui, il y a une croissance du numismatique sur ce blog à cause de ma curiosité tous azimuts, et récemment, pour l'histoire de la livre sterling. Un effet du trop-plein d'émissions de timbres ? Pour s'adapter, les articles numismatiques porteront désormais le nom de la devise monétaire en libellé afin d'aider à retrouver les articles par thème.

Mardi dix-sept mars 2015, la Royal Mint et le Chancelier de l'Échéquier britannique ont dévoilé le dessin qui ornera, à partir de 2017, le revers de la nouvelle pièce d'une livre sterling - une future émission que j'évoquais coïncidentalement lundi soir.

La nouvelle pièce, promise comme la plus sécurisée au monde, remplacera progressivement le modèle-petit jeton qui perdure depuis 1983.
La création de David Pearce, quinze ans (site de Royal Mint).
Au terme d'un concours lancé auprès du grand public depuis septembre dernier, c'est la proposition d'un adolescent de Walsall dans les West Midlands, David Pearce, qui a été retenu par Royal Mint et Sa Majesté. Il a été mis en forme par l'artiste David Lawrence et mis en lettre par Stephen Raw.

Le thème est somme toute classique au Royaume-Uni, depuis que le royaume est uni justement : les quatre fleurs emblématiques déjà visibles sur des timbres classiques, tel le demi-penny jaune de Malte en 1860, et - en ouvrant au hasard mon catalogue Spink des pièces britanniques - autour des armoiries traditionnelles sur des couronnes d'argent des années 1840...

Vieille question de curiosité thématique sur laquelle il faudra que je me penche à loisirs : depuis quand ces quatre fleurs figurent sur les marques de l'État royal.

Chez Pearce, les quatre plantes émergent d'une couronne... qui ne paraît pas être celle de George IV, définitivement associé à Elizabeth II et aux timbres au type Machin depuis 1967.

Vue diagonale du nouveau modèle mettant en valeur la gravure et la tranche (Royal Mint reproduit par BBC.com).
Outre l'aspect populaire et monarchiste du lancement de la nouvelle pièce, c'est surtout la sécurité que va apporter celles-ci aux consommateurs et commerçants que la Royal Mint promeut depuis mars 2014.

En effet, trois pour cent des pièces d'une livre en circulation sont des contre-façons ; phénomène qui affecte également les pièces de deux livres à cause d'une ressemblance technique avec les pièces bicolores rondes du reste du monde et les anciens billets de cinquante livres sterling (soixante-sept euros dans les cours actuels).

Douze côtés, évoquant les anciennes pièces de trois pence et dans l'habitude des polygones que sont les pièces de vingt et cinquante pence, et une présentation mystérieuse du fait que les automates la reconnaîtront et la distingueront des falsifications à coup sûr... densité ? Alliage déséquilibré au sein de la pièce ? Puce électronique passive ?

Ce n'est pas faute d'informer le public sur comment reconnaître les bonnes pièces d'une livre : deux posters au format pdf sont téléchargeables sur le site de Royal Mint. Le premier enseigne toute la logique des pièces : concordance des effigies avec les revers illustrés, ainsi que variation des devises sur les tranches selon les années. Le second est un poster reprenant tous les avers et revers par année.

Mais, a-t-on le temps de vérifier tout cela avec une poignée de pièces rendues en monnaie dans la main, et une file poliment - bienvenue hors de France - impatiente derrière soi.

Un des quatre seuls timbres émis du règne d'Edward VIII en 1936.
Par ailleurs, ce n'est pas la première fois qu'un adolescent participe à la création d'un symbole britannique. Côté philatélie, les archives du Greater Post Office font comprendre que la série d'usage courant d'Edward VIII est en bonne partie inspirée du projet soumis volontairement par H. J. Brown, alors dix-huit ans de Torquay, qui correspondait au dépouillement graphique et moderne recherché par le roi.

Brown fut remercié d'une simple lettre et la plainte du père après l'émission du timbre fut traitée par le silence administratif, comme nous l'apprend A.J. Kirk dans son étude de la série, publiée en 1974 par la Great Britain Philatelic Society - et encore disponible d'après son site web.

mardi 17 mars 2015

Cadeau mauritien de Feldman pour London 2015

Il y a une semaine, le mardi dix mars 2015, la maison d'enchères philatélique David Feldman a annoncé qu'il va exposer une pièce exceptionnelle lors de l'exposition européenne de Londres, du treize au seize mai prochain.
La plaque d'impression des Post Office de 1847 (site David Feldman).
Tous les lecteurs de magazines philatéliques connaissent l'histoire des deux premiers timbres de la colonie britannique de Maurice : cinq cents de chaque valeur, gravés par Barnard, au moment où la femme du gouverneur souhaitait envoyée ses invitations de bal de manière moderne...

La plaque d'impression était connue : vue en 1912, on se souvenait que Maurice Burrus l'avait achetée vers 1930 et exposée à Londres en 1935. Ensuite, le grand mystère jusqu'à la succession récente d'une nièce du grand collectionneur français qui permet à Feldman de la présenter au public... pour une vente prochaine ?

Ceux qui veulent découvrir ou redécouvrir l'histoire des Post Office de Maurice, tout en lisant un livre prenant comme une enquête, peuvent se reporter à l'ouvrage de Helen Morgan, Blue Mauritius, paru en 2006.

lundi 16 mars 2015

5e portrait royal et retour d'allégorie chez la Monnaie royale britannique

Le lundi deux mars 2015, la Royal Mint a dévoilé la cinquième et nouvelle effigie royale du règne d'Elizabeth II destinée à apparaître désormais sur les pièces de monnaie britanniques.

Une page du site de la Monnaie royale rappelle que le travail du jeune - trente-quatre ans - graveur maison Jody Clark succède à ceux de Mary Gillick (prédécimal, 1953), Arnold Machin (décimal, 1968 et qui inspira ensuite les fameux timbres-poste), Raphael Maklouf (1985) et Ian Rank-Broadley (1998).
La nouvelle effigie par Jody Clark (capture d'écran, site de Royal Mint).
Le mensuel Stamp & Coin Mart daté avril 2015 consacre deux pages dans sa partie numismatique, au concours et à la pièce victorieuse : il y est signalé les principales différences apparentes d'avec l'effigie de Rank-Broadley : toujours mature, la reine est désormais plus sereine, affichant un sourire franc.

Et j'ajouterai une chevelure plus animée.

Le revers des pièces britanniques de deux livers sterling de 1997 à 2015 (site de Royal Mint).
Ce n'est pas la seule nouveauté annoncée : la pièce de deux livres change de revers. Après dix-huit ans de service, l'histoire des réussites technologiques depuis l'âge de fer jusqu'à l'internet - du centre à l'extérieur de la pièce, est remplacée par Britannia.

Anthony Dufort permet ainsi le retour de la fière allégorie britannique après une parenthèse de sept ans, liée à la nouvelle série de revers constituant un puzzle héraldique.
Les deux faces de la nouvelle pièce de deux livres sterling de 2015 signant le retour de Britannia (site de Royal Mint).
La nouvelle pièce vise peut-être également à rassurer les Britanniques qui semblent avoir aisément peur de la falsification et des fraudes monétaires... Un constat réalisé l'année dernière lors d'un séjour à Liverpool avec des billets de cinquante livres sterling et confirmé par une brève de Stamp & Coin Mart daté août 2014.

Dans le premier cas, les vieilles coupures de cinquante avaient été tellement falsifiées que les commerçants étaient très méfiants envers les nouvelles coupures pleines de signes de sécurité !

Dans le second cas, la chaîne de supermarchés Morrisons annonçait refuser les pièces de deux livres aux caisses automatiques car celles-ci les confondaient aisément avec des pièces étrangères bicolores de même format... Vive la production de masse.

La brève rappelait qu'afin de lutter contre tout cela - fraude et fausse monnaie - la pièce d'une livre digne actuellement d'un signe jeton sera remplacée en 2017 par une pièce à douze côtés ; une annonce de Royal Mint du dix-neuf mars 2014.

dimanche 15 mars 2015

Terry Pratchett's Going Postal

Ce début d'année 2015 voit s'enchaîner les événements douloureux, les hommages médiatiques, doublés des souvenirs personnels liés à ses artistes.

Ce jeudi douze mars, l'écrivain de science-fiction Terry Pratchett disparaissait au terme d'une carrière intense en pages et tirages.
Le DVD du téléfilm Going Postal (site d'amazon.co.uk).
Je n'ai lu aucun de ses romans, même si un des quarante-et-un titres de sa série Discworld avait attrapé mon regard dans une librairie : Timbré. Ne lisant plus en traduction française ce que je peux lire en anglais, je n'avais pas acheté l'ouvrage, mais avait oublié de creuser son acquisition anglophone.

Ce mercredi onze, alors de passage dans un magasin HMV outre-Manche, je me lançais tenter par l'adaptation en téléfilm de Going Postal où le héros a le choix fantastique (au sens du genre littéraire) : la peine de mort ou devenir postier...

Incidemment, le lendemain, les journaux britanniques m'informaient de la vie et de l'œuvre du maître dont je découvrirai une adaptation prochainement.

vendredi 6 mars 2015

"Spock Your Five", numis-art au Canada

Avec la disparition de l'acteur Leonard Nimoy, le vingt-sept février 2015, la Banque du Canada fait face à un léger problème de fans de Star Trek.

Billet de cinq dollars à l'effigie de Wilfrid Laurier, mis en circulation en 2004 (site de Banque du Canada).
Sous le mode d'ordre des réseaux sociaux "Spock Your Five", des Canadiens métamorphosent au crayon et au feutre le portrait du Premier Ministre Wilfrid Laurier sur les billets de cinq dollars en une effigie de Spock, l'extra-terrestre vulcain incarné par Nimoy dans plusieurs séries et films de la franchise de science-fiction Star Trek.

Comme rapporté par La Presse, le mercredi quatre mars, rien n'empêche légalement de dessiner sur des billets canadiens... Je peste assez sur les marques de caissiers qui laissent au stylo-billes leur décompte de billets.

Cependant, Banque du Canada rappelle que cela peut entraîner un refus d'accepter le billet dans les commerces puisque le dessin peut empêcher de repérer les éléments de sécurité ou les fraudes possibles. Surtout que ce billet de cinq a connu deux versions en termes de sécurité au cours de sa carrière.

jeudi 5 mars 2015

En deuil : Marc Taraskoff

L'artiste Marc Taraskoff a quitté le monde philatélique le lundi deux mars dernier. Hier mercredi quatre, Pierre Jullien du Monde lui consacre une biographie abondamment illustrée.

Ahmad Shah Massoud 1953-2011, timbre créé par Marc Taraskoff, émis le 10 septembre 2003 (scan de Phil-Ouest).
Ce début des années 2000, alors que je reprenais un intérêt pour certains timbres de France pour une petite décennie sans φ, Taraskoff m'apparut pleinement avec le timbre Ahmad Shah Massoud.

Une personnalité étrangère déjà, d'une région du monde, dont nous nous rendons compte depuis le onze septembre 2001 qu'il aurait fallu s'occuper. Une représentation symbolique, toute une vie dans un regard, et sans taille-douce... Inouï dans le contexte magazine de l'époque.

Il n'y aura, hélas, plus de ces créations originales dans le programme philatélique français, ni de projets de Marianne détonnants, mais rappelant à la lauréate son caractère convenu.